L’ASTROLOGIE face à
ELLE-MEME
PROLOGUE à une
RENOVATION de la CRITIQUE de l’ASTROLOGIE
Astrologica
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Le milieu astrologique
Remarque préliminaire : ces pages n’ont aucune prétention sociologique,
l’auteur ne disposant pas de formation dans ce domaine, on conseillera au
lecteur d’y voir plutôt un témoignage de l’intérieur du dit milieu…
Le sociologue qui n’en connaîtrait pas encore l’existence, sera heureux
de découvrir le mémoire de DESS (1995) soutenu à Paris VIII par l’un des très
rares astrologues disposant d’un post-doctorat, Jacques Halbronn. Le milieu
astrologique, ses structures et ses membres, travail dirigé par Yves Lecerf,
constitue « un témoignage indispensable car unique en son genre » selon les
propos de Patrice Guinard.
Comme on en a présenté l’idée dans la catégorie Rhetorica (la diversité des thématiques comme 1er obstacle
aux débats), la multiplicité des thèmes sur lesquels on
peut interroger, discuter, contester ou défendre l’astrologie constitue une
facette à part entière de sa complexité. Il pourrait même y avoir des
spécialistes pour chacun de ces thèmes. Or, on comprendra que les
compétences requises pour espérer maîtriser un domaine aussi vaste sont
impossibles à réunir aujourd’hui. Ceci a des implications directes sur les
représentations de l’astrologie de chacun, celles des astrologues en
particulier, souvent encore autodidactes. Nous pourrons donc comprendre un peu
mieux la forme des débats sur l’astrologie et un certain manque de profondeur,
en remarquant que, quand il n’est pas autodidacte, la formation de l’astrologue
praticien se fait sur un faible nombre d’heures, n’impose pas forcément un
travail théorique, n’est pas assurée par des enseignants chercheurs reconnus.
Mais aussi que la profession d’astrologue n’est pas réglementée par un organisme
officiel, qu’il n’y a pas d’enseignement commun, qu’il n’existe pas non plus de
publication de référence dans le monde astrologique. Il faut voir ce milieu, en
fait, d’abord comme un milieu associatif dans lequel de nombreuses revues
sont certes publiées, mais toujours à un petit nombre d’exemplaires (quelques
dizaines en général). La « recherche » astrologique se fait donc au sein de
petits cercles qui en général ne communiquent pas entre eux, et toujours en
dehors des milieux de la recherche officielle. Aucun discours commun n’est donc
vraiment possible. De plus, la « recherche » astrologique reste toujours
orientée, limitée, voire prisonnière, de la recherche de sens, même quand
elle se réfère aux statistiques (qui sont là pour alimenter le débat, non pour
fonder, ou permettre un tri parmi les interprétations astrologiques…),
etc.
En général, on voit ici et là la communauté astrologique décomposée en
deux catégories, astrologie populaire et astrologie savante, afin de rendre
compte des pratiques astrologiques selon la noblesse de leurs questionnements ou
de leurs ambitions. Ces deux catégories sont aptes certes, à permettre la
distinction entre l’horoscopie médiatique (ou astrologie collective, fataliste
et hyper simpliste, véhiculée et littéralement maintenue en vie par les médias)
de l’astrologie traditionnelle (plus individuelle et propice à des
questionnements plus élaborés). En général, les membres de l’astrologie savante
y rejettent tout ce qui touche à l’astrologie horoscopique. En général… car le
docteur en sociologie Elizabeth Teissier constitue une exception à la règle qui
n'est probablement pas la seule. Mais qui a touché un peu à la critique sait
très bien qu’il ne suffit pas de rejeter l’astrologie médiatique pour pouvoir
échapper aux pires superstitions, et que des astrologues touchent donc aux
deux...
Mais il ne faut pas non plus galvauder l’appellation « savante »,
laquelle doit renvoyer effectivement à un certain savoir, mais aussi (surtout ?)
à certaines compétences théoriques. Or, si l’on ne définit pas l’astrologie
savante par ses bonnes intentions spirituelles ou causales, mais aussi par la
sanction de diplômes de 2ème ou 3ème cycles
universitaires, on verra alors que la grande majorité des astrologues
« savants » ne peuvent plus prétendre à cette catégorie. C’est pourquoi le
partage entre astrologies savante et populaire ne permet certainement pas de
rendre compte de la variété du milieu astrologique. Si l’on souhaite conserver
ces catégories, alors il faut en introduire une troisième, intermédiaire,
l’astrologie disons « cultivée ». Car il ne suffit pas « d’avaler des bouquins »
et de méditer longuement sur les malheurs du monde ou la nature de l’âme humaine
pour pouvoir développer des questionnements complexes et rationnels sur
l’astrologie.
L’astrologue cultivé, non rompu à la Recherche au sens universitaire du
terme, reste prisonnier de bien des contresens et des mythes relatifs à l’usage
de la raison (sur les origines et l’histoire de l’astrologie aussi). C’est
pourquoi l’astrologie « savante » en France ne doit plus compter bien plus
qu’une dizaine de représentants engagés (ou qui ont fait leur coming out, si
l’on préfère…), alors que l’astrologie « cultivée » elle, en compte des légions.
« Les astrologues savants » au sens habituel du terme, sont en fait pour la
plupart, bien plus proches de l’astrologie populaire que d’une astrologie
savante au sens par exemple du manifeste de Patrice
Guinard (docteur en philosophie). Ses conclusions sont certes discutables,
mais aussi bien plus élaborées que ce que l’on trouve ailleurs. La
semi-érudition qu’Adorno fit ressortir de son analyse d’une rubrique
horoscopique nous semble très bien correspondre à « l’astrologie cultivée »
dont nous venons de parler, une astrologie sincère mais limitée dans sa
méthodologie. L’astrologie n’a peut-être plus rien à apporter au monde, ce
pourquoi selon les sceptiques il n’est pas étonnant qu’elle ne progresse pas,
mais ne faut-il pas voir là aussi la conséquence nécessaire d’une population de
chercheurs hyper réduite ? Il est bien sûr tentant de voir là le résultat des
révolutions scientifiques successives que nous venons de traverser depuis
quelques siècles, le rejet, l’isolement et finalement l’immobilisme de pures
croyances. Pourtant, l’astrologie présente cette particularité de dépendre d’un
complexe outil mathématique qui lui, peut donner lieu à un examen rationnel
désacralisé. C’est ce que nous tentons de faire sur ce site, comme on l’a
expliqué sur notre page de garde et dans notre présentation (Pourquoi un tel site ?).
L’immobilisme de l’astrologie ne saurait donc être expliqué par la seule
conséquence de fondements obsolètes tant que cet examen n’aura pas été achevé…
il faut chercher les raisons pour lesquelles l’astrologue échoue à cela. Nous
pourrons renvoyer le lecteur vers divers pages de notre site pour des réponses
originales à cette problématique : sur la question de l’universalité de
l’astrologie comme néfaste ciment théorique, la pratique comme ciment quotidien
bien sûr, mais aussi l’astrologie comme limitée en tant que savoir-faire, tout
cela dans les autres sous-catégories de la présente catégorie
Astrologica.
Ces catégories générales d’astrologie savante et populaire ne permettent
donc de rendre compte que dans les grandes lignes de la forme des débats
présents au sein de la communauté astrologique, et en aucun cas de la si grande
diversité de sa population. C’est pourquoi nous proposons un autre type de
démarcation selon l’engagement de la personne vis-à-vis de sa croyance : quelles
sont les proportions de la pratique et de la théorie dans le quotidien du
croyant et les conséquences qui en découlent pour son discours ? Nous avons déjà
argumenté sur le fait que nous considérons le théoricien comme le grand absent
des débats sur l’astrologie (hors sceptiques), le métaphysicien et le praticien
astrologues étant prisonniers des questions du sens (voir pour cela la page de
la catégorie Rationalis ainsi que Quelques conséquences de l’indépendance des fondements et
des pratiques). Or, si les thématiques à explorer sont si
nombreuses et si diverses pour espérer avoir un certain recul sur les débats
concernant l’astrologie, et donc sur sa croyance, on comprendra que
l’investissement personnel vis-à-vis de l’astrologie est une donnée fondamentale
pour espérer comprendre comment on peut tenir des propos si variés, voire si
contradictoires à son sujet. Au lieu de chercher de nouvelles contradictions et
limites à l’astrologie ou à répéter les mêmes arguments sans faire vraiment la
distinction entre ceux qui sont justes et ceux qui sont faux, n’est-il pas plus
intéressant de se demander comment le croyant aborde ces complexes débats et ce
qui en découle ?
Astrologues, astrologisants, astrophiles et
astrogogos : un autre aperçu
de la communauté
astrologique
nous permettra de donner un autre aperçu de la population composant
l’abstraite « communauté astrologique »… On y verra encore pourquoi il est si
difficile pour la critique de toucher l’astrologue ou l’astrophile commun non
formé vraiment à l’argumentation rationnelle. La diversité des profils
astrologiques empêche l’impact direct de la critique quand, au contraire, elle
touche facilement ceux qui acceptent de placer la théorie avant la pratique, la
raison avant le contact empirique du terrain…
Serge BRET-MOREL
le 16 juillet 2009 |
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